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 Sujet du message: De la neurodiversité
MessagePublié: 23 Février 2021, 12:05 
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Le mouvement pour la neurodiversité, un progrès pour les personnes autistes?
Pauline Arrighi — 23 février 2021 à 7h20

Avec ce concept militant, qui considère qu'il existe une diversité des cerveaux humains et des fonctionnements neurologiques, l'autisme est vu comme une simple différence, pas une pathologie.
Les partisans de la neurodiversité affirment que leurs difficultés disparaîtront en adaptant la société à leurs différences. | Annie Spratt via Unsplash


Temps de lecture: 4 min

Corpulence, traits du visage, carnation: nos différences sont infinies, et il en va de même pour notre cerveau. Il existe autant de fonctionnements cognitifs que d'individus sur Terre. La notion de neurodiversité englobe ce constat et va au-delà: «Les différences neurologiques [doivent être] reconnues et respectées comme toute autre variation humaine.»

Neurodiversité? Forgée en 1998 par le journaliste Harvey Blume et la militante Judy Singer en appui des revendications portées par les personnes concernées depuis les années 1960, cette notion bouleverse la notion même de handicap. Loin d'être une pathologie qu'il faudrait absolument guérir, il ne serait au contraire qu'un décalage face au manque d'adaptation d'une société exclusivement conçue par et pour des personnes valides.


Ainsi, une personne autiste est-elle atteinte d'un trouble qu'il faudrait soigner voire éradiquer, si elle a accès à des lieux où son hypersensibilité sensorielle est prise en compte, avec une moindre luminosité par exemple? Ses gestes perçus comme brusques et répétitifs (battre des mains, secouer les membres, se frotter la tête, etc.) pourraient être aussi bien tolérés que les gestes réflexes que nous faisons tous, comme croiser et décroiser les jambes en position assise.

Car certaines pratiques varient d'une société à l'autre; comme parler en regardant l'autre en face, qui n'est pas un comportement naturel partout. «Regarder dans les yeux est mal vu au Japon. Même chose pour la capacité à tenir ses couverts à table: lorsque l'on a des troubles praxiques importants, on est vu comme quelqu'un de peu autonome et défavorisé dans des cultures où il faut manger avec des couverts ou sans se salir, mais pas dans des cultures où l'on mange avec les doigts», explique Thibault Corneloup, porte-parole du Collectif pour la liberté d'expression des autistes (CLE Autistes).

Et si la perception de l'autisme comme pathologie n'était finalement qu'une affaire de conventions sociales?

À LIRE AUSSI Le livre noir de l'autisme: en finir avec les tabous pour le bien des enfants

L'autisme, une simple différence?
«L'autisme en tant que tel ne vous fait pas souffrir. Ce qui vous fait souffrir, c'est l'exclusion, c'est le rejet», témoigne l'auteur Josef Schovanec.

Les partisans de la neurodiversité affirment que leurs difficultés en tant que personnes autistes disparaîtront avec «les nombreuses barrières physiques, culturelles et sociales d'une société qui ignore nos besoins sensoriels, notre style cognitif ou de communication. Nous voulons par exemple plus de recherches sur les méthodes de communication alternatives permettant d'exprimer plus de besoins ou d'avis quand le langage oral ne peut être utilisé», revendique Thibault Corneloup.


Les défenseurs du concept de neurodiversité seraient très souvent des personnes atteintes du syndrome d'Asperger.
L'autisme ne serait donc pas un trouble ni une pathologie, mais une simple différence. Un premier constat se dégage ainsi, d'après M'Hammed Sajidi, président et fondateur de Vaincre l'autisme, association active depuis vingt ans qui a déjà remporté plusieurs batailles juridiques déterminantes: selon lui, les défenseurs du concept de neurodiversité seraient très souvent des personnes atteintes du syndrome d'Asperger, qui ne souffrent pas de difficultés lourdes aux niveaux intellectuel et cognitif.



Des troubles pluriels
Il faut dire que la notion d'«autisme» recouvre une multitude de réalités. L'autisme est un «trouble précoce du développement du système nerveux central», selon la définition de la Haute Autorité de santé.

Reconnu comme un handicap en France depuis 1996, l'autisme se caractérise par des difficultés à lire et comprendre les émotions d'autrui, une incompréhension de l'implicite et donc une difficulté à nouer des relations sociales, des centres d'intérêt restreints, des gestes stéréotypés et répétitifs et une sensibilité sensorielle surdéveloppée.

«Certaines personnes autistes ont exprimé le souhait de voir l'autisme soigné. Cela suscite l'indignation des partisans de la neurodiversité.»
Jonathan Mitchell
Le trouble du spectre autistique (TSA), comme il est convenu de l'appeler en référence au DSM-5 (dernière édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux), concerne environ 1% de la population selon l'Inserm. «Les études les plus récentes parlent aujourd'hui d'1 naissance sur 50», précise le Livre blanc scientifique et international de l'association Vaincre l'autisme, publié en 2018.


L'autisme, c'est aussi parfois une incapacité à parler, une surcharge d'émotions et d'angoisses face à l'incommunicabilité qui peut entraîner des comportements violents, destructeurs ou des automutilations. Mère d'un enfant gravement atteint, l'autrice américaine Amy S.F. Lutz a ainsi recueilli sur son blog des témoignages de parents qui évoquent des agressions physiques d'enseignantes, d'élèves et de personnes inconnues, mais aussi des troubles alimentaires, des insomnies chroniques, etc.

Plus de la moitié des enfants autistes ont des comportements violents envers les autres et/ou eux-mêmes, révèle ainsi une étude publiée en 2013 dans la revue Research in Autism Spectrum Disorders. Et 31% des enfants diagnostiqués avec un TSA présentent une déficience intellectuelle associée.


Un concept militant ou scientifique?
Concerné lui-même par ce trouble, l'Américain Jonathan Mitchell ne se reconnaît pourtant pas dans le discours des militants en faveur du concept de neurodiversité. «Certaines personnes autistes –dont moi-même– ont exprimé le souhait de voir l'autisme soigné. Cela suscite l'indignation des partisans de la neurodiversité. Ils assimilent un remède à l'autisme à l'eugénisme et au génocide. [...] Beaucoup de personnes autistes ne savent ni parler ni utiliser un ordinateur. Ils ne peuvent pas s'opposer à la “neurodiversité” parce qu'ils ne peuvent pas exprimer leur position. Ils sont trop handicapés, pourrait-on dire.»

Selon M'Hammed Sajidi, le discours d'associations comme le CLE Autistes n'est que l'avis d'un groupe de personnes sur un sujet qui, en effet, ne concerne qu'elles: leur santé. La notion de neurodiversité, à la fois descriptive et normative, n'a aucun fondement scientifique, rappelle-t-il. C'est un concept militant qui ne doit pas prévaloir sur des données factuelles.

Dans les faits, l'autisme est une maladie dont on ne connaît pas les causes. En tant que maladie, l'autisme entraîne un handicap, c'est-à-dire une vulnérabilité dans l'accès aux droits. La mission première de l'association est de garantir l'accès aux droits fondamentaux, notamment une adaptation du système scolaire. En cela, elle rejoint les revendications liées à la neurodiversité. M'Hammed Sajidi dénonce ainsi les incapacités du système de santé lui-même, qui montre un manque criant de connaissances de la maladie et de ressources pour accompagner ces personnes.

Cela étant, et c'est le propos de Vaincre l'autisme grâce à qui des méthodes abusives comme le packing et l'usage de neuroleptiques a été interdit en France, dénoncer une situation d'exclusion ne signifie pas nier que l'autisme est une «aberration neurologique» qui entraîne de graves difficultés et que la majorité des personnes autistes souffrent d'un handicap cognitif. Puisse le progrès dans l'accès aux droits ne pas se faire aux dépens de la recherche médicale vers une moindre souffrance.



http://www.slate.fr/story/201826/autisme-mouvement-concept-neurodiversite-progres-personnes-autistes-pathologie-differences


Un question que je trouve intéressante...
Sur la question des troubles autistiques, on ne peut pas nier qu'ils soient variés, et qu'un Asperger qui a des capacités cognitives dans la moyenne voire au-dessus de la moyenne ne vivra pas les choses de la même manière qu'un autiste lourd incapable de communiquer.
Et la prise en charge thérapeutique de l'un et de l'autre ne sera sûrement pas la même... sans nier pour autant le fait qu'être "pas toujours adapté" aux "autres" et à leur façon de vivre et de voir les choses est nécessairement générateur de souffrance.

Et d'ailleurs, c'est pour ça que je trouve la question intéressante, parce qu'elle remet aussi en question le concept même de "normalité" et d'adaptation... et pourrait s'appliquer à d'autres "troubles" tels que l'hypersensibilité, l'anxiété, voire même des pathologies psychiatriques.
Si on doit, certes, mettre en place des thérapies pour ne pas que les personnes souffrent ou deviennent dangereuses pour eux-mêmes et autrui... j'ai toujours trouver très injustes et même en un sens inhumain et "faux" de considérer que puisqu'une majorité vit "comme ça", selon telles normes et bien... ça serait à ceux qui sont à la marge et "différents" (alors qu'objectivement, le terme de "différents" ne veut rien dire : on est tous différents les uns des autres, par définition) devraient s'adapter et être considérés, justement comme "pas adaptés" voir "malades". :think:

Est-ce qu'il est plus fou de hurler dans un stade parce que "son" équipe de foot favori gagne, que de parler à des voix dans sa tête, ou rester enfermer dans sa chambre à écouter de la musique classique parce que le vacarme des autres vous insupporte ?
Franchement, je sais pas. Il y a des tas de choses qui semblent irrationnelles dans ce monde qui ne sont pas considérées comme déviances, et des "déviances" qui me paraissent à moi presque saines, finalement... :shifty:

D'autre part, si notre société était plus ouverte et, finalement, moins "dogmatique" dans l'acceptation des caractères, personnalités, et façon de vivre, il est évident qu'elle serait aussi génératrice de beaucoup moins de souffrance.
Et pour le reste, peut-être que plutôt de considérer que les gens sont juste "malades" et qu'ils faut les "soigner", on pourrait cesser de les réduire à leur supposé "maladie", mais juste voir que se sont des êtres humains, pas moins dignes que n'importe quel autre, qui souffrent et qui ont juste besoin de soin. Et de considération...

D'ailleurs, je pense que c'est justement ce qui fait la force des thérapies par l'animal dans l'amélioration de la situation des enfants autistes, même très lourds : un animal ne juge pas ce que vous êtes, il ne va chercher à vous changer en tant que tel, il va juste offrir de l'affection et de la joie à la partie de vous-même qui souffre.

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 Sujet du message: Re: De la neurodiversité
MessagePublié: 23 Février 2021, 19:19 
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C'est intéressant, en effet. Je dois t'avouer que je suis assez partagé sur la question. D'un côté, je comprends tout à fait que des gens qui souffrent de tel ou tel handicap puissent se sentir exclus de la société et en souffrir cruellement. Il est évident qu'il faudrait faire œuvre de pédagogie auprès du grand public afin de mieux faire connaître les caractéristiques de l'autisme et les difficultés qu'il entraîne, afin qu'il soit mieux accepté au sein de la société. De l'autre côté, je suis un peu mal à l'aise avec l'idée qui voudrait que l'on fasse en permanence des aménagements à la façon de vivre de la société pour pouvoir inclure tout le monde. Je pense qu'on vit déjà dans une société particulièrement ouverte et tolérante. J'ignore ce que les autres membres plus âgés du forum en pensent, mais ma grand-mère me dit par exemple souvent que la pression de la mode semble beaucoup plus légère aujourd'hui que de son temps, et qu'elle voit aujourd'hui des jeunes arborer une infinité de styles vestimentaires différents, là où de son temps c'était l'exclusion sociale qui menaçait celui qui ne s'habillait pas comme les autres ou n'aimait pas le chanteur du moment. De la même façon, il est possible grâce à internet de découvrir des gens partageant les mêmes intérêts que nous, et donc de trouver des amis plus facilement que jamais. Il est donc relativement facile de s'intégrer. Par ailleurs, je ne pense pas qu'il y ait d'un côté les autistes, exclus de la société, et de l'autre l'homo societae pur, aussi à son aise dans la société qu'un poisson dans l'eau. Personne n'est à son aise dans la société, tout le monde fait des efforts pour s'intégrer, autiste ou pas autiste, et tout le monde sera jugé, qu'il soit fan de musique classique ou de foot. Et donc tout le monde doit faire des efforts, qui peuvent pour certains être vraiment durs, pour quelque raison que ce soit, et s'intègre du mieux qu'il peut dans une société qui n'est pas uniquement une façon normative de vivre décidée par le haut, mais aussi et surtout une chose malléable qui prend la forme que les gens lui donnent — et cette forme est celle, démocratique, de ce qui gêne le moins le plus de monde de faire*.
Enfin voilà, j'espère que mon pavé vaguement réac n'a pas trop dévié du sujet, et que je ne suis pas trop à côté de la plaque. En tous cas, tel était mon avis sur la question.

*Académie Française, me voilà

Du reste...

Citer:
Ils assimilent un remède à l'autisme à l'eugénisme et au génocide.

Eh bé ! Il y en a qui n'ont peur de rien.

Citer:
comme le packing et l'usage de neuroleptiques a été interdit en France,

C'est quoi ?

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 Sujet du message: Re: De la neurodiversité
MessagePublié: 23 Février 2021, 20:21 
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Pochel a écrit:

Citer:
comme le packing et l'usage de neuroleptiques a été interdit en France,

C'est quoi ?


Le packing, c'est le fait de mettre un enfant autiste dans un linge froid pour le "calmer".


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 Sujet du message: Re: De la neurodiversité
MessagePublié: 23 Février 2021, 21:33 
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:wtf:

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 Sujet du message: Re: De la neurodiversité
MessagePublié: 24 Février 2021, 08:55 
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C'est souvent justifié à l'aide de théories psychanalytiques à la c*n.


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 Sujet du message: Re: De la neurodiversité
MessagePublié: 24 Février 2021, 10:07 
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Article intéressant, Chimère !

Les deux positions ne sont pas incompatibles, a priori... On peut très bien continuer la recherche pour soigner les autistes qui veulent être soignés, et accepter ceux qui ont juste besoin d'être acceptés.
Dans un monde idéal, je veux dire...

Poch : j'aime bien ce que tu dis, même si je ne suis pas d'accord avec tout...

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De la même façon, il est possible grâce à internet de découvrir des gens partageant les mêmes intérêts que nous, et donc de trouver des amis plus facilement que jamais. Il est donc relativement facile de s'intégrer.

Ben non. Comme tu le dis toi-même plus bas, tout le monde doit faire des efforts, et les efforts sont encore plus importants pour les autistes...! Et ce n'est pas parce que j'ai des âmes-soeurs sur tous les continents que je suis moins exclue at home... :shifty:

PS
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Je sais pas pour vous, mais ça m'énerve, ça... :twisted:


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MessagePublié: 24 Février 2021, 10:18 
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DragoMath a écrit:
Ben non. Comme tu le dis toi-même plus bas, tout le monde doit faire des efforts, et les efforts sont encore plus importants pour les autistes...! Et ce n'est pas parce que j'ai des âmes-soeurs sur tous les continents que je suis moins exclue at home...

C'est juste !

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 Sujet du message: Re: De la neurodiversité
MessagePublié: 24 Février 2021, 10:50 
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Je sais pas pour vous, mais ça m'énerve, ça...


Je n'y fais pas spécialement attention, dans la mesure où c'est purement indicatif (on a pas tous la même façon de lire).


Citer:
Les deux positions ne sont pas incompatibles, a priori... On peut très bien continuer la recherche pour soigner les autistes qui veulent être soignés, et accepter ceux qui ont juste besoin d'être acceptés.
Dans un monde idéal, je veux dire...


Dans l'absolu, c'est ce que je pense aussi.
Cela dit, je pense aussi que les "militants" cités par l'article réfutent justement le terme de "soigner", parce qu'on soigne les maladies, les grippes ou les cancers... Mais un autiste est-il vraiment "malade" ? De même qu'un trisomique d'ailleurs ?
On ne les "guérira" pas de ce qu'ils sont, tout simplement...

Et plus avant, où commence la "maladie" ou le "trouble" ? Est-ce qu'un hypersensible est malade ? Je pense que tout le monde dira que non, c'est juste un mode de fonctionnement différent...
Par contre, on s'accordera plus facilement pour dire qu'un bipolaire ou un autiste est malade... et quelque part, c'est intéressant de se demander tout simplement "pourquoi ?" et "au nom de quoi ?", finalement.
Juste parce qu'une "norme" a été posée au fil du temps ? Mais on sait bien que cette norme est mouvante... Il fût un temps où on lobotomisait les homosexuels aussi, parce qu'ils étaient malades, justement (bon, il existe encore des thérapies de conversion, mais dieu merci, elles sont décriées voire interdites).

Ce que je veux dire, c'est qu'on peut aussi redéfinir non seulement le concept de "maladie" mais se dire que finalement, la maladie est plus dans notre façon de la voir et de la comprendre, et aussi de définir ce qui est sensé être "sain"... que chez les soi-disant malades eux-mêmes.

Ce n'est pas pour autant qu'il ne faut pas apporter du soin et faire en sorte que ceux qui souffrent, souffrent le moins possible. Mais dès que l'on parle de soins, d'aide, voire même de thérapies, je trouve qu'on sort du "médical" pour aller faire une approche plus humaine et compassionnelle (au sens propre du terme). Et on ne catégorise plus les gens aussi. Le "soignant" n'est plus là dans une démarche purement descendante "je vais te soigner pour que tu sois sain", mais dans une démarche d'accompagnement "je vais t'aider à te faire sentir mieux, comme tu as envie d'être mieux".
Et c'est totalement différent comme approche.


Citer:
Personne n'est à son aise dans la société, tout le monde fait des efforts pour s'intégrer, autiste ou pas autiste, et tout le monde sera jugé, qu'il soit fan de musique classique ou de foot. Et donc tout le monde doit faire des efforts, qui peuvent pour certains être vraiment durs, pour quelque raison que ce soit, et s'intègre du mieux qu'il peut dans une société qui n'est pas uniquement une façon normative de vivre décidée par le haut, mais aussi et surtout une chose malléable qui prend la forme que les gens lui donnent — et cette forme est celle, démocratique, de ce qui gêne le moins le plus de monde de faire*.


Hum. La question que ça me fait me poser c'est surtout "est-ce que la majorité a raison, juste parce que c'est la majorité ?". :think:
Personnellement, je pense que non. Et je pense aussi que justement l'attitude de jugement, c'est purement renforcé par l'idée qu'il y a 2 camps : une majorité, une norme, à laquelle il est "bien" de se conformer et une minorité, une anormalité.
Mais... tout ça, ça ne rime à pas grand-chose en fait. Et quelque part, est-ce que la propension à vouloir être dans le camp de la majorité, c'est aussi très narcissique comme attitude. C'est juste guider par l'ego, qui veut être "bien vu". Mais ce n'est pas forcément un élan naturel.

Et il y a des tas de trucs que font une majorité de gens, donc qui est une norme sociale, qui est en réalité délétère, pour eux-mêmes et pour les autres. Ou qui sont immoraux, injustes ou contre l'éthique.
Je ne suis pas anti-démocrate, parce que je suppose que toutes choses égales par ailleurs, c'est encore le système le moins pire qu'on est trouvé (en attendant que les humains soient un peu plus éclairés), mais je ne pense pas que la majorité ait toujours raison et soit toujours dans le juste. :think:

D'autre part, cette notion d'effort sous-entend que si une personne n'a pas réussi à s'intégrer, bah c'est un peu de sa faute. Elle n'avait qu'à faire plus d'efforts, après tout.
Et à une époque où l'on parle, par exemple, de harcèlement scolaire qui mène parfois des enfants ou des ados au suicide, je trouve qu'on ne peut pas dire "il faut faire des efforts pour s'intégrer". Je pense que c'est l'inverse : il faut faire des efforts pour accepter les autres. Et c'est à la fois au collectif, et à chaque individu de le faire.
De prendre un peu de recul sur son propre ego et de comprendre que la manière dont il voit le monde, ce n'est jamais qu'une carte mentale et absolument pas une quelconque vérité. Et que tout le monde dessine sa carte mentale différemment, mais que ce n'est pas grave en soi. C'est juste une question de communication, et la communication c'est certes parler/émettre. Mais c'est aussi écouter/recevoir.

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 Sujet du message: Re: De la neurodiversité
MessagePublié: 24 Février 2021, 11:27 
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Chimère a écrit:
D'autre part, cette notion d'effort sous-entend que si une personne n'a pas réussi à s'intégrer, bah c'est un peu de sa faute. Elle n'avait qu'à faire plus d'efforts, après tout. Et à une époque où l'on parle, par exemple, de harcèlement scolaire qui mène parfois des enfants ou des ados au suicide, je trouve qu'on ne peut pas dire "il faut faire des efforts pour s'intégrer". Je pense que c'est l'inverse : il faut faire des efforts pour accepter les autres. Et c'est à la fois au collectif, et à chaque individu de le faire.

Tu distords mon message pour me faire dire des choses que je n'ai jamais dites. Ce que je disais, c'est en substance que tout le monde doit faire un effort pour s'intégrer à la société, que ce n'est facile pour personne. Je n'ai jamais dit que cela justifiait de harceler, de tracasser, de tourmenter ceux qui restent en dehors. C'est une très grande différence, puisque justement, c'est faire preuve de bien peu de capacités sociales que de harceler des gens. Si les harceleurs se comportaient en accord avec ce que la société attend d'eux, ils ne harcèleraient pas.
Et d'autre part, il est évident qu'il faut faire des efforts pour accepter les autres, mais que cela n'exclue pas qu'il faille également faire des efforts pour s'intégrer. Car si tout le monde a le droit au respect, nul n'est tenu de faire le premier pas envers les autres qui sont plus bizarres.

Chimère a écrit:
Hum. La question que ça me fait me poser c'est surtout "est-ce que la majorité a raison, juste parce que c'est la majorité ? (...) Et quelque part, est-ce que la propension à vouloir être dans le camp de la majorité, c'est aussi très narcissique comme attitude. C'est juste guider par l'ego, qui veut être "bien vu". Mais ce n'est pas forcément un élan naturel.

La majorité n'a peut-être pas toujours raison, mais le fait qu'elle ait parfois tort ne donne pas automatiquement raison à la minorité.
Et ne te méprends pas, je ne dis pas ça parce que je suis dans le camp de la majorité. Il y a beaucoup de situations ou d'éléments qui me mettent dans le camp de la minorité. Mais je ne dirais pas nécessairement que j'ai raison dans ces cas-là. En fonction du contexte, je module plus ou moins ce que j'aime ou ce que je suis afin de permettre une expérience de socialisation optimale pour tous, et j'attends des autres qu'ils en fassent autant (ce qui est le cas, ou alors je change de fréquentations). Ainsi, chacun lissant plus ou moins les aspects les plus saillants de sa personnalité en fonction du contexte, on peut parvenir à un compromis acceptable pour tous.
Pour moi, ce n'est pas une question d'égo (hormis peut-être dans le cas des gens qui sont littéralement creux et n'aiment des choses que parce qu'elles sont populaires). Je pense que la majorité des gens aiment se sentir différents — il suffit de penser à tous ceux qui proclament "ne pas être comme les autres" et "ne rentrer dans aucune case" (alors que ce sont souvent les plus faciles à classifier). C'est juste qu'un minimum de respect des normes sociétales permet de fluidifier ses relations sociales, et aussi d'en développer de nouvelles sur des bases communes.

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 Sujet du message: Re: De la neurodiversité
MessagePublié: 24 Février 2021, 14:33 
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Si les harceleurs se comportaient en accord avec ce que la société attend d'eux, ils ne harcèleraient pas.


Si on est d'accord que la base de bonnes relations sociales ce sont le respect, "ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'ils te fassent" en gros et la politesse... Je ne sais pas si on peut dire que c'est en réalité le message que la "société" envoie.

Je veux dire qu'il y a des normes sociales qui sont comme des axiomes, personnes ne semblent se poser de questions dessus et pourtant... est-ce que c'est vraiment ce que signifie la manière dont fonctionne la société ?

Je veux dire, si on reprend l'exemple du harcèlement scolaire, en effet, il semble qu'un enfant qui en maltraite un autre sera, en principe, réprimandé.
Mais au final, le système scolaire est lui-même basé sur quoi ? Sur la compétition déjà : dans un système de notations individuelles, on ne peut pas dire que la collaboration, l'entraide soient des valeurs encouragées.
Plus encore, il y a tout un tas de règles non dites, modes, réseaux sociaux, qui vont aussi encourager le harcèlement (parce que ça tombe toujours sur celui ou celle qui est "différent" parce que trop pauvre, trop petit, trop gros, voir trop "intelligent" ou en difficultés scolaires etc...), et au final valoriser les harceleurs vis à vis de leurs pairs d'une part (un harceleur n'est pas la victime dans l'histoire. C'est pour ça qu'on retrouve souvent des harcelés qui deviennent harceleurs, pour ne plus être une "victime" et reprendre le contrôle), et même vis à vis du système d'autre part, parce que beaucoup d'adultes se contentent de "c'est des histoires de gosses", "ça les endurcit" etc...

Parce que justement, on part du principe que la vie sera dure, que c'est un peu la loi du plus fort (ou du plus riche, du plus beau etc...)... sauf que "la loi du plus fort", n'est-ce pas l'inverse de la vie en société ? Pourtant, elle est toujours valorisée, consciemment ou pas, dans notre société.
Et quand tu observes bien comment tourne toute "société", grande ou petite (un bureau, par exemple), et bien... il n'y a pas forcément de grandes différences avec une cour d'école en réalité.

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Traduction française officielle © Maël Soucaze