J'allais te répondre sur l'autre forum, mais autant le faire ici...
Intéressant travail de réflexion autour de ce point de la Guerre des Gaules (dont je ne me souvenais plus, d'ailleurs). Quelques remarques pêle-mêle :
ananaskiller a écrit:
Cet Ambiorix n’aimait pas les Romains et il voulait par-dessus tout retrouver la liberté de son peuple en écrasant cette légion venue les narguer au centre même de leur pays.
Attention à ne pas surfer les clichés archéologico-romantiques du XIXème siècle... Ambiorix est un figure mythique nationale en Belgique, un peu comme Vercingétorix en France. Les belges ont fait d'Ambiorix un symbole, l'archétype du chef épris de liberté cherchant à sauver son peuple du joug romain.
C'est une image sympathique, mais elle est à prendre avec des pincettes
king-size, car devant plus aux écrivains du siècle dernier qu'à la réalité historique.
Et au demeurant, les Romains avaient rendu un fier service aux Edurons, en les soustrayant de l'influence du peuple des Aduatuques dont les Edurons étaient vassaux...
ananaskiller a écrit:
Ambiorix réussit à s’échapper avec 4 hommes de main fidèles et César ne put jamais le retrouver dans les profondeurs des Ardennes. Certains pensent qu’il fut à l’origine de la légende du Cheval Bayard (conte liégeois).
Je ne vois pas trop le rapport entre la légende du Cheval Bayard (surtout si on la resitue dans le contexte de la chanson de geste des
4 fils Aymon) et la fuite d'Ambiorix dans les Ardennes...
ananaskiller a écrit:
On pense que celle-ci se trouve à l’endroit de l’actuelle ville de Tongres, car elle fut appelée Atuatuca Tungorum. Or, Atuatuca se trouve être un mot générique voulant désigner une place forte, un lieu fortifié.
D'où tiens-tu cette information ?
Si César tient les Edurons pour un peuple germanique, ils étaient plus probablement celtique : Ambiorix est un nom typiquement celte, pas de doute à avoir là-dessus - et ce ne serait pas la première fois que César se trompe dans sa description d'une tribu.
Or, les collines et places fortes celtiques sont marquées dans la toponymie par la racine *-dun. On la retrouve dans Dinan, Lyon (
Lugdunum, soit littéralement "la fortesse de Lug")...
ananaskiller a écrit:
On pense que les Romains se sont établis dans un endroit fortifié déjà construit par les Éburons, une sorte de village fortifié, au centre même du pays des Éburons, ce qui parait logique.
Ça peut sembler logique, mais ce n'est pas nécessairement le cas. Plus que la localisation au centre d'un territoire, je pense que c'est plutôt une situation propice (sur une colline, avec une vue bien dégagée) qui devait conditionner la construction d'un fort.
ananaskiller a écrit:
Lorsque les Romains prirent la décision de quitter le camp, ils prévoyaient de se diriger vers le camp de Cicéron vers Mons. Pour ce faire, ils devaient traverser la Meuse, ce qui est relativement aisé pour une armée. Mais les rares survivants qui s’enfuirent sont allés du côté du camp de Labienus à Sedan. Ce qui parait logique, une petite quantité de soldats ne pouvaient pas se permettre de passer la Meuse à découvert, ils profitèrent donc des forêts ardennaises pour atteindre le camp de Labienus à Sedan-Mouzon.
Là encore, ce sont des suppositions hasardeuses. On peut imaginer que dans la confusion de la débâcle, les soldats romains aient fui de façon désordonnée, ou qu'ils aient été poursuivis par les guerriers édurons...
On n'était malheureusement pas sur place pour voir comment les choses se sont passées.
Citer:
Dans cette vallée on retrouve différents noms de lieux dits qui ne laissent pas sans impressions.
Les villages aux alentours par exemple : « Libeek » vient d’un patois néerlandais voulant dire « ruisseau de sang », « Moerslag » voulant dire « bataille dans les marais », « Rémersdael » voulant dire « vallée des Romains »…
Les noms de bois et vallées : « Hakkenknoep » voulant dire « colline piochée » (d’après l’auteur oublié qui a visité les lieux, et sur lequel je me base, il y aurait des traces de trous et de place d’armes invisibles par les Romains, mais bien visibles lorsque l’on fait le chemin inverse vers la forteresse). « Rombosch » voulant dire « bois romain », « Mortsgraven » = « fossé aux morts », « bloedgraff » = « fossé sanglant »…
De plus, certains hameaux auraient pris les noms (transformé) des 2 généraux : « Schophem » (Sabinus) et Ketten (Cotta).
L’un des auteurs sur lequel je me base trouve même une similitude avec le lieudit « Oettgroven ». Oett- = Attu- -> fossé d’Attu -> Atuatuca.
J'avoue que c'est ce point là qui m'a fait le plus tiquer dans ton message. Les archéologues ne se basent quasiment jamais sur la toponymie pour retrouver un site historique (même si les chercheurs du XIXème siècle avaient souvent recours à cette méthode), et ce pour plusieurs raisons :
- il est illusoire de penser que la mémoire populaire aurait conservé (fut-ce via la toponymie) le souvenir d'évènements s'étant déroulés il y a plus de 2000 ans. Je veux dire, est-ce que tu peux nous raconter de façon détaillée un évènement qu'aurait vécu ton arrière grand-père ?
Cela est d'autant plus vrai que la Belgique et les Pays-Bas ont connu par la suite de nombreuses vagues de migrations de populations germaniques venues de l'Est, qui ont complètement submergé et effacé la culture celtique qui s'y trouvait.
Et tu en conviendras avec moi : les Francs n'avait qu'une connaissance infime (sinon nulle) de la guerre des Gaules. Et de toute façon, savoir qu'un bataille avait opposé une obscure tribu celtique avec les Romains n'aurait guère eu d'intérêt pour eux : ce n'était pas l'histoire de leur peuple.
La toponomye de la Belgique et des Pays-Bas, comme celle de la France d'ailleurs, doit essentiellement à la langue romane/germanique parlée au Haut Moyen-Age.
Il faut vraiment creuser pour trouver des traces des substrats antérieurs à cette période. Substrats qui peuvent être germaniques (liés aux envahisseurs barbares de la Basse Antiquité : Burgondes, Francs, Alamans, Wisigoths...), celtiques pré-gallo-romains, voire même exceptionnellement non-indo-européens (antérieurs à l'invasion des Celtes, et souvent apparenté au basque).
Ces traces sont souvent obscures et très déformées par le temps : le nom ne renseigne presque jamais sur un évènement précis qui s'y serait déroulé, mais plutôt sur une particularité topographique (une colline, un fleuve) ou une fonction (une forteresse ou un lieu sacré). Je pense par exemple à la ville de Dijon, qui vient de
*divio, terme vague désignant un temple ou une place sacrée... Il faut chercher la ressemblance et la signification !
- tu nous mentionnes les différents noms de patelins faisant allusion à des massacres et tu les relis à l'embuscade dont furent victimes les Romains...
... mais as-tu pensé à vérifier si ces noms ne pouvaient pas s'expliquer par d'autres évènements plus récents (probablement médiévaux en toute logique, puisque ces noms sont en patois flamand...) ou par des particularités topologiques ? As-tu regardé si en dehors du secteur que tu prospectes, il n'y avais pas des noms de ce type ?
la toponymie est souvent trompeuse, et il est très périlleux d'échafauder de savantes théories à partir de vagues ressemblances (qui doivent probablement plus à la coïncidence qu'à autre chose).
C'est de cette façon que Thor Heyerdahl justifiait sa théorie d'un peuplement de l'île de Pâques par des populations sud-américaines : en se basant sur la ressemblance entre certains mots pascuans et des mots issus de divers langues précolombiennes... Dans la pratique, les langues humaines ne présentant pas un nombre infini de possibilités de construction, il est nécessaire de retomber sur des similitudes (même pour deux langues très éloignées).
Tu tombes un peu dans le même genre de travers, je trouve... Ton interprétation toponymique repose sur :
1) des correspondances approximatives dont certaines, oserai-je le dire, sont un peu ridicules... comme ces deux patelins dont le nom rappelle à peine celui des généraux romains (outre le fait qu'il n'y a absolument aucune raison pour que leurs noms soient ainsi passés à la postérité dans la toponymie ?).
2) des interprétations tarabiscotées, comme
Hakkenknoep (le lien avec les Romains est particulièrement ténu et repose sur la bonne foi d'un unique auteur) ou
Rombosch (qui ne doit peut-être rien aux romains... il existe deux patelins dans le Nord-Est de la France, Rombas (57) et Rombach-le-France (68), dont le nom signifie en francique "le ruisseau de Rumo", Rumo étant un propriétaire terrien franc).