Paul Binocle a écrit:
Tout à fait - mais il faut reconnaître qu'il y a quelque chose d'un peu gênant dans la manière dont pas mal de sites ont annoncé « Le yéti est un croisement d'ours, mystère résolu ! » parce que quelqu'un a prouvé que des échantillons de poils que certaines personnes attribuaient au yéti appartenaient en réalité à une espèce d'ours.
C'est un peu comme si l'on se basait sur le débunking des célèbres "scalps de yéti" (en réalité, des artefacts fabriqués à partir de peau de serow) pour rejeter en bloc l'existence du yéti et affirmer qu'il s'agissait d'une chèvre sauvage locale...
C'est un peu intellectuellement malhonnête. On peut réfuter l'existence du yéti sur la base d'un faisceau de preuves concordantes (ou en l’occurrence, plutôt une
absence totale de preuve), mais pas juste en se reposant sur une unique démonstration.
Cela étant dit, cette étude est intéressante car elle va paradoxalement dans le sens de la culture tibétaine, qui effectue une très forte assimilation entre l'ours et le yéti. Je me permet de citer ce que j'ai écrit dans l'article "Yéti" de l'Encyclopédie :
Citer:
Le tradition himalayenne ne fait pas clairement la distinction entre le yéti et l'ours. Le folklore le dépeint comme une sorte d'homme sauvage à moitié animal, dont les traits les plus marquant sont la capacité à marcher sur ses deux pattes arrières, un crâne pointu en forme de "pain de sucre" et un corps recouvert de longs poils sombres ou roux.
[...]
Au Tibet, le nom dzu-teh (« ours du bétail », du tibétain ཛུ་དྲེད, dzu-dred) sert à la fois pour désigner le yéti et certaines espèces d'ours de montagne telles l'ours bleu du Tibet (Ursus arctos pruinosus) et l'ours brun de l'Himalaya (Ursus arctos isabellinus).
On notera que cette assimilation ours/homme n'est pas propre au Tibet, on la retrouvait également anciennement dans toute l'Asie, l'Europe ainsi qu'en Amérique du Nord dans les croyances natives américaines. L'ours a été perçu comme un ancêtre ou un homme retourné à la vie sauvage ; on le disait amateur de jeunes filles, capable de comprendre le langage des humains ou de se métamorphoser en homme...
Je pense qu'on peut l'expliquer assez facilement par certaines caractéristiques de l'ours qui n'avait pas échappé aux anciens : sa station bipède, et ses empreintes de pattes postérieures très similaires à un pied humain. Et je ne résiste pas à l'envie de citer Gaston Phoebus, comte de Foix en Ariège et grand chasseur (1331-1391), qui mentionnait ainsi que
« quand l'ours fait sa besogne avec l'ourse, ils la font à la manière d'homme et de femme, tout étendus l'un sur l'autre ».