Lamart a écrit:
À noter que la ou les personnes qui ont fait la carte ne sont pas très douées en géographie ou ont vraiment très schématisé l'europe, puisque mon pays n'y figure pas, et qu'au 16ème et 17éme siècle l'Allemagne n'existait pas encore ni l'Italie d'ailleurs...
Edit : Sans oublier l'Anschluss qui a été effectif que bien plus tard.
Cela dit, en Suisse, les bûchers y furent très actifs et on a le triste privilége d'être le dernier pays européen à avoir brûlé une "sorcière".
Si
de facto la Suisse était indépendante depuis bien longtemps, elle est restée
de jure intégrée au Saint-Empire jusqu'en 1648. On peut d'ailleurs dire la même chose à propos des Provinces-Unies (les Pays-Bas).
Il n'en reste pas moins que la carte du Saint-Empire est fausse en ce sens qu'elle omet d'intégrer l'Italie du Nord, qui était peu ou prou dans la même situation que la Suisse : appartenance
de jure à l'Empire, mais exclusion
de facto puisque la plupart des réformes administratives impériales depuis Charles Quint ne s'y sont pas appliquées (notamment la subdivision de l'Empire en cercles).
Bien évidemment, parler d'Allemagne et d'Italie sont des abus de langage, dans ce contexte. Le Saint-Empire lui-même est une entité plus formelle que réelle, d'ailleurs : un regroupement de plusieurs centaines d'États avec des degrés variés d'autonomie. Quant à l'Italie, une bonne partie des territoires figurés appartiennent en fait à la branche espagnole des Habsbourg.
En dehors de ces erreurs et simplifications, la carte en tant que telle figure grosso modo la situation politique de l'Europe entre 1595 et 1601. Pourquoi ? Parce que :
- l'Ingrie (la région de l'actuelle St-Pétersbourg) est russe (perdue par la Suède en 1595, reconquise en 1617) ;
- Dombes, Bresse, Bugey et pays de Gex ne sont pas encore français mais dépendent du duché de Savoie (globalement inclus dans "l'Italie" sur la carte). L'annexion française est entérinée par la traité de Lyon en 1601.
On notera que plusieurs des pays représentés étaient en union personnelle (deux États distincts ayant le même souverain) : Espagne-Portugal, Angleterre-Irlande, Danemark-Norvège (l'Islande dépendant de cette dernière).
Ah, et parmi les menus détails erronés, signalons l'île de Dagö (aujourd'hui Saaremaa à l'ouest de l'Estonie) qui devrait être danoise et non suédoise, ainsi que la Crète et Rhodes, possessions vénitiennes et non ottomanes.
@DragoMath : "l'Allemagne" (le Saint-Empire) était dans une situation religieuse extrêmement complexe. On ne peut pas vraiment dire qu'elle était majoritairement protestante, seulement très divisée. Son morcellement politique aggravait le problème, le principe étant que chaque prince de l'Empire était libre de changer de religion, auquel cas la nouvelle obédience devenait la religion officielle sur ses terres (ce qu'on résumait par
cujus regio, ejus religio - "tel roi, tel religion"). Sachant que les princes en question étaient prompts à changer de foi par simple calcul politique, je te laisse imaginer le bazar, et le décalage entre cette pratique et la réalité religieuse au sein des populations.
Pire : avant 1648, le luthéranisme est la seule obédience protestante officiellement reconnue dans l'Empire*. Alors que d'autres courants, en particulier le calvinisme, ont en réalité de nombreux adeptes et que certains princes s'y sont convertis. Sachant bien sûr que luthériens et calvinistes, loin d'être unis, sont souvent antagonistes.
* (je laisse volontairement de côté les diverses confessions utraquistes, qui ne concernent que les États de Bohême et constituent un cas particulier)
Quant à la Pologne, je suis moins au fait de la question, mais il me semble qu'elle a compté une forte minorité protestante à une époque (tout comme la Hongrie). Sans oublier la présence de nombreux orthodoxes sur son immense territoire.
Je vous remercie d'avoir prêté attention à cette longue digression, vestige du temps où je m'étais intéressé de près à la guerre de Trente Ans et à son contexte.