Encyclopédie du paranormal - Ours Nandi

     Ours nandi


Cryptide est-africain de grande taille, assimilé à un ours par les colons et certaines tribus


Depuis très longtemps, les traditions de nombreuses tribus est-africaines (du Kenya notamment) décrivent une mystérieuse créature simiesque de grande taille.
En raison de sa vaste aire de répartition, cette créature est connu sous une multitude d’appellations locales. Au Kenya et en Tanzanie : chemosit, chimiset, kerit, gereit, geteit, kereit, keteit (Pays Mau et Nandi), koddoelo (Wa-Pokomo), dubb, duba (provenant éventuellement de l'arabe دب dubb (ours) ou ضبع dubbah (hyène)) (Wa-Swahili). Rwanda : ikimizi ou kikambangué. Ouganda : salrookoo (Bagishu et Sagaï), engargiya (Buganda, Bunyoro), entarargo (Kigezi)...
Bernard Heuvelmans l'a principalement décrit sous le nom de chemosit ou chimiset, ce qui explique que ce terme soit couramment employé par les cryptozoologues.

Les colons anglais qui auraient aperçu le cryptide ont de leur côté rapproché l’allure générale de la bête de celle de l’ours, ce qui a donné à la bête le nom d’ours nandi, en raison de la proximité avec la tribu des Nandi.


A ce jour, la principale source d'informations concernant ce cryptide est Bernard Heuvelmans, qui a réalisé un important travail de collecte de témoignages et consacre un chapitre entier du tome 2 de son ouvrage Sur la Piste des Bêtes Ignorées à l'ours nandi, ainsi qu'une partie de son livre posthume Les Ours Insolites d'Afrique.


Témoignages notables et description

Les Nandi, peuplade indigène de l’ouest du Kenya, décrivent dans leur folklore une créature que les cryptozoologue ont assimilé à l'ours nandi. Les descriptions varient toutefois selon les individus et peuvent parfois être assez fantaisistes.
Par exemple, Kitapmetit Kipet, un chef de village Nandi, dit qu’il s’agit d’ « un diable qui rôde entre les huttes par les nuits les plus sombres, cherchant des personnes et plus particulièrement des enfants pour les dévorer. Il est moitié-homme et moitié comme un énorme oiseau à face de singe. La nuit, on peut le repérer à son hurlement effrayant, et au fait que sa bouche rougeoie comme de la braise dans les ténèbres. » Ali, le guide du chasseur Roger Courtney, le décrit comme un grand animal blanc et velu qui « marche debout comme un homme et ne mange que la cervelle de ses victimes ». Le capitaine William Hichens l'a entendu décrire comme une « bête mi-homme mi-gorille, soufflant du feu, dotée d’un œil étincelant au milieu du front, émettant un hurlement plaintif vraiment effrayant ».

La première observation de l’ours nandi faite par un colon remonte à 1905. Le témoin, Geoffrey Williams, ne la révéla pourtant qu’en 1912 dans le Journal of the East Africa and Uganda Natural History Society, craignant de rencontrer auparavant l’incrédulité de ses auditeurs. Il raconte sa rencontre avec le fameux chemosit sur le plateau d’Uasin-Gishu, vers neuf heures du matin, juste après qu’une épaisse brume se soit levée.

« […] Il régnait un brouillard épais ; mon cousin et moi marchions en avant du safari avec un boy, quand la brume, soudain, se dissipa. Mon cousin s’écria : « Qu’est-ce que c’est que ça ? » Tournant le regard dans la direction qu’il désignait, je vis un grand animal assis sur son séant, à moins de dix mètres de nous. Son attitude était tout-à-fait celle d’un ours du zoo mendiant des friandises, et j’estime qu’il devait avoir près de cinq pieds [1,50m] de haut. Il est extrêmement difficile d’évaluer une hauteur en pareilles circonstances, mais il nous sembla à tous deux que l’animal était presque aussi grand, ou peu s’en fallait, que nous. Avant que nous eussions eu le temps de faire quoi que ce fût, il s’était laissé retomber en avant et avait décampé gauchement en direction de Sirgoït, avec ce que mon cousin décrit toujours comme « une sorte de petit galop de guingois ». Comme l’herbe avait été brûlée au ras du sol quelques semaines auparavant, l’animal nous était distinctement visible.
« Je bondis sur ma carabine et lui tirai dessus alors qu’il disparaissait parmi les rochers. Bien que je l’eusse manqué, il s’arrêta et tourna la tête pour nous regarder. C’est dans cette position que je le revois le plus clairement dans mon esprit. Par la taille, il était, à mon avis, plus grand que l’ours qui vit dans le fossé du zoo et tout aussi puissamment bâti. Son avant-train était couvert d’une épaisse fourrure, ainsi que ses quatre pattes, mais son arrière-train était relativement lisse et nu. Cette distinction était très nette et c’est la première chose qui nous frappa tous deux. Sa tête était longue et effilée et faisait penser de manière irrésistible à l’ours, comme d’ailleurs tout le reste de l’animal. Je ne me souviens pas très bien de l’aspect de ses oreilles, sinon qu’elles étaient très petites ; et sa queue, s’il en avait une, était minuscule et pratiquement indistincte. Sa teinte était sombre et elle nous donna à tous les deux l’impression d’être plus ou moins mouchetée comme chez un gnou, mais ceci peut n’avoir été qu’un effet de lumière.[…]

Un autre témoignage notable est celui d’un ingénieur des chemins de fer, M. Hickes, qui en avait longuement aperçu un en se rendant sur le chantier de la voie ferrée de Magadi le 8 mars 1913. Longeant la voie, il aperçut la bête vers 9 heures du matin. Selon lui, la bête était trapue, avec le garrot élevé et une crinière hirsute de couleur brune. Elle atteignait la taille d’un lion.

Plusieurs autres personnes rejoignirent Williams et Hickes en ajoutant leur propre témoignage à la liste. On put alors établir un portrait-robot de l’animal, même si les descriptions variaient d’un individu à l’autre :

  • La taille était selon les uns de plus d’un mètre au garrot, de moins d’un mètre selon les autres.
  • Certains décrivirent le pelage comme étant fauve, brun ou clair, d’autres affirmèrent qu’il était tout noir.
  • Une partie des colons expliqua que l’animal leur évoquait l’ours de par sa taille, sa démarche lourde et traînante et son museau pointu. Les autres comparèrent plutôt sa forme générale à celle d’un ours de petite taille.
  • Enfin, un certain nombre de témoignages étaient indirects : relevés d’empreintes, récits d’attaques sur du bétail, des animaux sauvages (retrouvés mutilés) ou même des huttes. En effet, un récit indigène faisait état de l’attaque d’un chemosit qui, après être monté sur le toit d’une habitation en pleine nuit, était passé au travers. Les villageois le tuèrent alors en y mettant le feu.
  • De plus, l’ours nandi fut régulièrement associé à un hurlement plaintif considéré assez unanimement comme étant effrayant.

Malheureusement, malgré quelques récits faisant état de preuves anatomiques (ossements ou peaux), aucune ne put être examinée. Une personne montra une peau et un crâne en les attribuant à l’ours nandi, mais le zoologue qui réalisa l’expertise conclut qu’il ne s’agissait que de la peau d’une hyène tachetée anormalement rouge et du crâne d’un très gros léopard.

Mosaïque romaine d'El Jem, Tunisie, montrant un probable ours de l'Atlas
(Source : Institut Virtuel de Cryptozoologie)


Identité de l'ours nandi

La possibilité que l’ours nandi soit un ours est extrêmement faible et elle est considérée comme peu sérieuse par la plupart des cryptozoologues. Aucun ours n'a jamais pu être observé en Afrique noire (centrale et du Sud).
La seule espèce d’ours connue sur le continent africain est l'ours de l'Atlas (Ursus arctos crowtheri), qui peuplait les massifs montagneux du Maroc à la Tunisie et dont le statut phylogénique n'est pas encore élucidé à l'heure actuelle (espèce à part entière ou sous-espèce de l'ours brun continental ?). Jadis plutôt abondant (l'ours de l'Atlas est mentionné par plusieurs auteurs romains et représenté sur des fresques antiques), il a petit à petit décliné, probablement sous l'influence de la pression humaine et des changements climatiques qu'a connu le Sahara. Les derniers spécimens de l'ours de l'Atlas ont semble-t-il été tués à la fin du XIXe siècle.

Certains auteurs n'écartent pas toutefois l'hypothèse d'un ursidé inconnu, avançant que les ours peuvent très bien s'adapter à un climat tropical (comme en témoignent des espèces comme l'ours à collier, l'ours lippu et l'ours malais qu'on peut trouver dans le Sud de l'Asie). En outre, des fossiles d'ours préhistoriques (du genre Agriotherium et Indarctos) ont été trouvés en Afrique, et ces espèces n'ont disparu du continent qu'il y a 5 millions d'années.


Certaines descriptions ont été reliées à un animal connu : le ratel ou zorille du cap (Mellivora capensis). Sorte de blaireau africain, celui-ci a semble-t-il le pelage qui s’assombrit avec l’âge : les plus vieux mâles — et donc les plus gros — sont de couleur entièrement noire. Cela plus le fait que certains mâles solitaires adoptent un régime plus exclusivement carnivore que leurs congénères pourrait expliquer la ressemblance troublante avec un petit ours dans l’esprit des colons européens.

Le ratel, gros mustélidé d'Afrique dont de vieux spécimens auraient pu être confondus avec un ours

De grandes hyènes au pelage anormalement rouge, en raison de leur aspect inhabituel, ont également pu être assimilées à l’ours nandi. De plus, des observations d’animaux rares ou méconnus des observateurs, comme l’oryctérope ou le lycaon, ont dû alimenter le dossier de cet animal problématique.

L’archéologue Louis Leakey a également émis l’hypothèse de la survivance tardive d’un autre animal fossile, le Chalicothère, un très gros mammifère ongulé du Miocène (entre 20 et 5 millions d'années avant notre ère) dont le dos en pente et l’allure lourde pourraient convenir aux descriptions. Cependant, celui-ci était herbivore et ne semble pas avoir peuplé l’Afrique.
Le cryptozoologue Karl Shuker a quant à lui a proposé la survivance de la Pachycrocuta brevirostris, une hyène préhistorique de très grande taille (1 mètre au garrot pour 150 kg) qui s’est éteinte il y a environ 500 000 ans en Afrique.

L'ours nandi est plus rarement présenté comme une sorte d'homme sauvage?, qui serait l'équivalent africain du bigfoot ou du yéti


Bernard Heuvelmans, dans son ouvrage Sur la Piste des Bêtes Ignorées, affirme quant à lui que deux hypothèses supplémentaires peuvent être ajoutés à cette liste :

  • Des hommes costumés en animaux sauvages, souhaitant faire attribuer leurs crimes à des animaux, comme ceux de la célèbre société secrète des Aniota, ou « homme-léopards ».
  • Un cryptide, le chemosit, qui expliquerait les témoignages de colons comme Williams ou M. Hickes en 1912. Celui-ci est rapproché d’un babouin géant de mœurs nocturnes par Heuvelmans. En effet, de nombreux éléments physiques (démarche et galop, museau, présence d’une queue minuscule, d’une crinière imposante près de la tête mais d’un postérieur quasiment nu, longs bras et dos en forte pente, présence de viande dans le régime alimentaire...) font penser au babouin, ainsi que des éléments comportementaux (chemosit monté sur le toit d’une hutte par exemple). Heuvelmans pense que ce grand singe pourrait descendre de gigantesques babouins préhistoriques tels le Dinopithèque, et seraient rarement vus en raison de leur habitat forestier (les observations ont souvent été faites à proximité de forêts) et de leurs mœurs nocturnes (la plupart des récits d’attaques parlent de faits s’étant déroulés en pleine nuit). Le fait que les indigènes eux-même rapprochent le chemosit d’un très grand singe tendrait à confirmer cette théorie.

Comparaison entre les tailles d'un homme et d'un Dinopithecus ingens
Source : Kawekaweau (deviantART)


Aucun ouvrage francophone sur la question de l’ours nandi n’est paru mis à part les deux livres d’Heuvelmans en 1955 et 2015 ; de même, aucune vraie investigation d’importance n’a été menée sur le terrain depuis. De fait, l’ours nandi reste un cryptide mystérieux et les informations disponibles à son sujet sont très réduites.


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Noms alternatifs : l'ours nandi (nom donné par les colons) est connu sous une multitude de noms (correspondant aux diverses dénominations locales de sa vaste aire de répartition), dont la graphie française est fluctuante selon la langue considérée et sa transcription en alphabet latin. Par exemple : chemosit/chimiset, kerit/gereit...

Traduction anglaise : Nandi Bear

Localisation : Kenya, Rwanda, Tanzanie, Ouganda, Afrique

Liens complémentaires :

Bibliographie :

  • Sur la Piste des Bêtes Ignorées, tome II, Bernard Heuvelmans, Plon, 1955.
  • Les Ours Insolites d'Afrique, Bernard Heuvelmans, Éditions de l'Œil du Sphinx, 2015.

Catégories : O ; Cryptozoologie ; Créatures
Auteur : Herr Magog
Mise en ligne : 25/07/12
Dernière modification : le 18/03/16 à 19:23